Il faut cependant arrêter même si cet objet est fascinant.
Et pourquoi en parler donc ? Parce que c’est un sujet de philosophie mais aussi le contraire absolu de l’autre objet de l’asseoiement dans le monde dit «arabe». Ou même ailleurs. Le contraire du banc public c’est la chaise de pouvoir. L’ancien trône. Le fauteuil du conseil des ministres. La chaise du pouvoir, traduction brute, métaphore du régime dans la lasse poésie des dominés. Là, la chaise est en dur, extension, selon l’humour, de la colonne vertébrale du père du peuple, devenu grand-père des peuples depuis la mort des décolonisations. La chaise est fixe, à vie, sans dossier. On ne peut pas l’arracher sans s’arracher la peau ou les cheveux. Sans jeu de mots. Il faut rêver de cette pièce de théâtre à deux, entre ces deux objets. Le face-à-face entre la chaise et le banc public. Cette confrontation entre la critique et le discours. Cela devrait être amusant, tendu par un dialogue dur et sourd à la fois. Deux éternités avec deux gardiens de buts différents.
Chute sur le pire. Le pire c’est quand les deux objets deviennent un dans l’histoire d’une nation. Quand la chaise du pouvoir est à la fois la chaise du pouvoir et le banc public. Collusion fascinante qui transforme le temps quotidien en une fâcheuse éternité. Alors le temps s’arrête, coagule, se bloque sur ses propres chaussures et nous bloque avec lui comme des papillons en ciment. On y réussit cette prouesse d’incarner à la fois le centre du monde et sa marge. Son problème et sa fausse solution. Le vieillissement y devient une fin en soi, pas un accomplissement, la preuve d’un cycle. Un conte sublime où l’on finit par manger les enfants, après les avoir endormis, pour reprendre une métaphore. A la fin, « ils furent heureux, épousèrent les apparences, et mangèrent beaucoup de leurs enfants nés après l’indépendance », mais n’arrivent ni la nuit, ni le jour.
Le cauchemar c’est quand les rides deviennent le drapeau d’un pays, au lieu d’être un marque-page dans le beau livre de tous. Alors on prend la mer ou l’avion ou la direction de ses propres cheveux dans le vent.